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Nigéria : dans l’État de Zamfara, insécurité rime avec malnutrition - SOLIDARITÉS INTERNATIONAL
Depuis plusieurs années, le banditisme et les kidnappings sont le lot quotidien des habitants du nord-ouest du Nigéria, dont beaucoup n’ont d’autre choix que de fuir leur foyer. Sans sources de revenus et sans possibilité d’accès à leurs champs, la faim s’installe durablement chez ces personnes déplacées, notamment dans l’État de Zamfara, qui affiche des taux de malnutrition élevés.
Au nord-ouest du Nigéria, l’État de Zamfara est l’épicentre de la violence des groupes armés. Convoitant les ressources en or, les troupeaux et plus généralement toute possibilité de manne financière, ces bandes organisées commettent des exactions qui terrorisent la population.
Quand l’insécurité pousse à fuir Alors que l’agriculture est la principale source de subsistance de la population, “beaucoup de fermiers ne peuvent plus cultiver leurs terres, c’est trop risqué”, constate Deborah Obise, responsable sécurité alimentaire et moyens d’existence pour SOLIDARITÉS INTERNATIONAL. “La plupart de ceux qui ont été kidnappés l’ont été dans leurs champs”, poursuit-elle. Pour espérer retrouver leurs proches sains et saufs, les familles de victimes sont contraintes de payer d’importantes rançons, “elles doivent vider toute leur maison pour payer”, se désole Zubairu Mohammad, président du conseil de la région d’Anka. Certains doivent faire appel à des campagnes de crowdfunding ou à la solidarité de communautés voisines. D’autres paysans encore sont forcés de travailler dans les champs des groupes armés, ou de partager leur récolte avec ces derniers.
La crainte de telles violences ou leur imminence pousse les villageois à fuir, laissant derrière eux leur foyer et tout ce qui leur permettait de vivre, dont leurs cultures et leurs bêtes. En juillet 2025, plus de 200 000 personnes étaient déplacées dans l’État de Zamfara, 88% d’entre elles en raison du banditisme et des kidnappings¹. Une situation précaire qui a des conséquences désastreuses sur l’accès à l’alimentation.
Nigéria
Contexte et action
237,5
millions d'habitants
161ème
sur 193 pays pour l'Indice de Développement Humain
119 919
personnes bénéficiaires
Le fléau de la malnutrition Sur les marchés, les étals sont de moins en moins remplis et les prix sont élevés. Or, privées de leurs terres, les familles se retrouvent aussi sans revenus et ne peuvent acheter les aliments dont elles auraient besoin. Les taux de malnutrition dans la région atteignent des niveaux alarmants. “Les jeunes enfants et les femmes enceintes et allaitantes sont particulièrement vulnérables, explique Deborah Obise. Dans le Zamfara, nous avons examiné près de 10 700 enfants, 4 300 d’entre eux étaient malnutris et sur 6 100 femmes, près de la moitié étaient malnutries.” Des dépistages suivis d’une prise en charge complémentaire par les acteurs de santé et de nutrition les plus proches.
Pour lutter contre ce fléau, depuis août 2024, SOLIDARITÉS INTERNATIONAL et son partenaire local FINDEF, avec le soutien du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères français, mènent dans l’État de Zamfara un projet aux multiples facettes, auprès des personnes déplacées et des communautés hôtes qui les accueillent. Si ces zones sont considérées plus sûres, elles ne sont pas épargnées par la malnutrition.
Renforcer la sécurité alimentaire Dans les régions de Guzau, Talata Mafara, Anka et Maru, on peut ainsi croiser régulièrement dans les champs des groupes de femmes, leurs longs voiles colorés flottant entre les hautes tiges vertes, ou accroupies près des plants de choux, d’épinards et d’oignons. Plus de 4 000 ont été formées à des pratiques agricoles respectueuses de l’environnement. “On avait des problèmes avec les parasites, alors il nous a été conseillé de broyer des feuilles de margousier, décrit par exemple Hafsat Malami, 45 ans. On les a tamisées puis versées sur les plantes et on a pu voir l’amélioration.”
Saadatu Illiyasu, habitante de Guzau, énumère, elle, les semences et outils agricoles qu’elle a reçus : “Il y a eu du maïs, du soja, du millet, puis des imperméables, des gants, des serpes, des pulvérisateurs…” À ses côtés, son mari, Umar, assure que “les progrès sont énormes”. De “10 à 15 sacs de produits agricoles”, ils en tirent aujourd’hui “25, 30, parfois 35 !” Alors que le changement climatique perturbe le calendrier des récoltes et leur rendement, la formation permet aux habitants les plus vulnérables d’être mieux préparés à faire face aux aléas climatiques.
“Les enfants sont en meilleure santé” En parallèle, des cantines scolaires ont été mises en place dans huit écoles de l’État de Zamfara permettant à près de 6 000 enfants de recevoir des repas équilibrés, deux fois par semaine. “Mes enfants sont si impatients de manger les repas de l’école qu’ils y vont même quand ils sont malades, plaisante Shafaatu Abdullahi, 40 ans. Avant, la faim les empêchait de retenir quoi que ce soit, mais maintenant, bien nourris, ils restent concentrés et peuvent mieux apprendre”, poursuit fièrement la mère de famille. Elle a elle-même été sensibilisée à la préparation de plats nutritifs et à la réduction des risques liés à l’hygiène. Elle observe déjà que “les enfants sont en meilleure santé.”
Près de 8 229 foyers ont aussi reçu pendant trois mois une aide monétaire devant leur permettre d’accompagner leur enfant souffrant de malnutrition, sans craindre de ne plus avoir de revenus pour subvenir aux besoins du reste de la famille. C’est le cas d’Husaina Isah, 25 ans, habitante de la région de Maru. La jeune femme a ainsi pu “mettre ses enfants à l’école, acheter de la nourriture ainsi que deux bêtes”, raconte-t-elle depuis la cour de sa maison, entourée de ses chèvres. Elle se réjouit car l’une d’elle va bientôt mettre bas et sa vente au marché lui permettra “d’acheter d’autres choses”. Un cercle vertueux qu’observe aussi le leader communautaire Zubairu Mohammad, dans la région d’Anka. “Cette aide en a encouragé plus d’un à lancer leur petit commerce, qui leur permet de subvenir seuls à leurs besoins”, abonde-t-il.
Sur les visages des personnes qui témoignent, hôtes comme déplacées, le soulagement est visible. Le programme de lutte contre la malnutrition leur offre un répit et des perspectives d’avenir que le banditisme et l’insécurité chronique leur avaient depuis longtemps confisqués.
Photos : © John Peters Anyanwu / SOLIDARITÉS INTERNATIONAL
Source : ¹ IOM, Nigeria — North-west and North-central Displacement Report Round 17 (July 2025)
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Article publié le lundi 1 décembre 2025

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