C’est un récit à deux voix, celles de ces jeunes filles, parfois encore des fillettes, qui ont été enlevées, violées, tuées durant la décennie sanglante (les années 1990) en Algérie. La narration s’est nourrie du recueil de nombreux témoignages, particulièrement difficiles à recevoir tant le sujet est tabou. Elle ne cherche pas à les restituer mais à en capter la terrible dislocation, intime et collective. L’auteure, Wahiba Khiari, qui a quitté l’Algérie en 1997, a su trouver une ligne d’écriture particulièrement juste pour faire entendre et cette dislocation et les questions qui restent posées. Que deviennent ces femmes aujourd’hui ? Mortes ou vivantes ? Mortes-vivantes ? Où sont les enfants qu’elles ont parfois été contraintes de porter, l’avortement leur ayant été refusé ? Que pensent-elles d’une « réconciliation nationale » qui les sacrifie une nouvelle fois ? Si elle a pu fuir et échapper au séisme, Khiari le porte au plus profond d’elle-même et ne peut s’en défaire. Pas plus que nous qui la lisons.
Marina Da Silva.
Article publié le samedi 17 octobre 2009
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