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 « Yo nani? » – Congo Indépendant
C’est le titre, en lingala, d’une chanson de l’artiste-musicien congolais Felix Wazekwa. Deux mots qu’on pourrait traduire en français par: qui êtes-vous? Ou encore: pour qui vous prenez-vous? Dans ce Congo démocratique où l’on compte quatre langues nationales, cette même expression se traduit comme suit: Nge nani (Kikongo)? Uko nani (Swahili)? Wewa ngani (Tshiluba)?

De quoi s’agit-il? Le vendredi 23 mai, « Joseph Kabila » a surpris l’opinion tant congolaise qu’internationale en prononçant un « message à la nation » au ton comminatoire. Questions: au nom de quel principe? Qui lui a donné mandat? Pour qui se prend-t-il?

L’ancien président qui s’est découvert une nouvelle vocation de médecin a déclaré que ce pays – qu’il a dirigé pendant dix-huit ans en despote non-éclairé – « est gravement malade et son pronostic vital est engagé ». Des mots. Rien que des mots.

Après ce « diagnostic » erroné, l’ex-bras droit de James Kabarebe, alors colonel, chef des troupes rwandaises déployées au Congo-Zaïre, préconise, en guise de thérapie, la lutte armée. Objectif: « mettre fin à la dictature » et « arrêter la guerre ». Tiens! Tiens! Pas un mot de condamnation sur l’agression du territoire congolais par le Rwanda.

Fils putatif de Mzee ils putatif de feu président Laurent-Désiré Kabila, « Joseph » et sa fratrie considèrent-ils la République démocratique du Congo comme un bien personnel ou un « héritage familial » légué par Mzee? A-t-il rejoint le M23 à Goma pour « honorer » le fameux accord du 23 mars 2009 signé entre son régime et le CNDP (Congrès national pour la défense du peuple) aux termes duquel les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu devaient être déclarées « zone sinistrée »? Est-il allé à Goma pour conforter le narratif de Paul Kagame selon lequel le M23 est une affaire congolo-congolaise pour nier l’agression? Quid de cinq mille soldats de la RDF (Rwandese Defence forces) déployés dans les deux Kivu?

Depuis le dimanche 25 mai, « Kabila » se trouve à Goma, le chef-lieu de la province du Nord-Kivu, sous occupation du M23/RDF/AFC. « J’ai le devoir d’œuvrer à la recherche de la paix », a-t-il dit dans son speech. Peut-on parler de paix tout en rappelant sur un ton martial un prétendu « serment de militaire jusqu’au sacrifice suprême »?

A Goma, « Kabila » qui est venu, en réalité, prendre la tête du mouvement insurrectionnel M23/AFC, multiplie des consultations pour faire diversion: Chefs religieux (29 mai); chefs coutumiers (30 mai); association des femmes et la société civile (31 mai). Tous ces interlocuteurs ont exprimé leur impatience de voir le « retour définitif » de la paix. Ils attendent de l’ancien chef de l’Etat d’user de sa « sagesse » pour atteindre cet objectif. Mwami des Hunde, Nicolas Kalinda n’a pas autre chose à la presse.

Aux dernières nouvelles, on apprenait que « Kabila » a tenté, en vain, de soudoyer les Wazalendo afin qu’ils rejoignent le M23/RDF/AFC. Il est clair que l’ex-raïs veut reconquérir le pouvoir pour le pouvoir. Pour lui, l’impérium n’a jamais été une force pour rendre servir à la collectivité. Il n’y voit que les privilèges.

Qui est « Joseph Kabila »? C’est lors de la chute de la ville de Kisangani, en mars 1997, entre les mains des soldats rwandais de l’AFDL, que les Zaïrois d’alors ont entendu parler d’un certain « commandant Hyppo » qui serait le fils de LD Kabila. Dans son édition datée du 6 juillet 1997, le quotidien Washington Post écrit notamment que « la mère de Joseph Kabila est la sœur de James Kabarebe ». L’information n’a jamais été démentie.

En décembre 2000, la nouvelle de l’exécution du commandant Anselme Masasu Nindaga au village Kantonia, près de Pweto, est révélée, depuis Lubumbashi, par le défenseur des droits humains, Golden Misabiko. Celui-ci est arrêté et transféré à l’immeuble GLM à Kin. Un bâtiment réputé jadis comme centre de tortures des « libérateurs » autoproclamés.

Durant sa détention, Misabiko, en bon fouineur, a noué des relations avec des Kadogo emprisonnés. Cette situation lui a permis d’obtenir des informations personnelles sur « Kabila ». « Son identité est fausse », tonne Golden. Et d’ajouter: « C’est à Kisangani en mars 1997 qu’il avait adopté le patronyme de Kabila. Son identité réelle est Hyppolite Christopher Kanambe ». « Il n’est pas le fils de Laurent-Désiré Kabila ».

Misabiko est formel: « Joseph Kabila est un citoyen Rwandais ». « Avant d’arriver au Zaïre [en octobre 1996 à l’âge de 25 ans, NDLR] il a évolué au sein de l’Armée patriotique rwandaise ». On apprendra qu’il a fait le service militaire dans l’armée tanzanienne à Mbeya. Preuve s’il en était besoin que l’homme était au moins un citoyen étranger au moment où il foulait le sol zaïrois.

Se fondant toujours sur des confidences obtenues auprès des Kadogo ayant fait la route d’Uvira à Kinshasa, Misabiko lâche: « Je peux vous affirmer que Joseph Kabila se drogue à la cocaïne ». Il dit tenir cette information d’une source sûre.

Le Tweet de « Stavros » Quel est le rôle joué par « Joseph Kabila » dans l’assassinat de « son père » le 16 janvier 2001? C’est la question lancinante qui hante tous les esprits. Et ce, vingt-quatre années après. On le sait, cette nouvelle tragique, fut annoncée « en exclusivité » à Kigali où les « coopérants militaires rwandais », renvoyés fin juillet 1998 de la RDC, ruminaient leur courroux contre le Mzee.

A en croire Stavros Papaionou, ancien patron de la compagnie aérienne Hewa Bora Airways, deux heures après l’attentat qui a coûté la vie à LD Kabila, il a reçu un appel de James Kabarebe: « Nous savons que tu as de bons contacts avec le ministre de la Justice [Jeannot Mwenze Kongolo, NDLR]. Dis-lui que nous souhaitons qu’il prenne en charge le pays ». Vous avez bien entendu: le président d’un pays étranger, en l’occurrence le Rwanda, avait choisi le Congolais devant succéder au défunt Président. Un comble!

Dans un message sur son compte X (Twitter), « Stavros » dit avoir transmis le message à qui de droit. Il cite deux conseillers de Mwenze présents. A savoir: Pascal Senga et Célestin Cibalonza. « Une heure après, le ministre Mwenze Kongolo me demande d’envoyer un avion chercher Joseph Kabila à Lubumbashi », conclut Stavros qui va se rétracter plus tard.

Dix-huit ans de pouvoir, ça suffit! Le 26 janvier 2001, le successeur de Mzee est investi à la tête de la RDC. A la surprise générale, tous les Banyarwanda/Tutsi qui « chaperonnaient » « Papa Kabila » ont fait un retour en force à Kinshasa: Bizima Karaha, Moïse Nyarugabo, Azarias Ruberwa etc. En 2008, bonjour mixage et brassage des FARDC avec les combattants du CNDP. L’armée nationale est infiltrée.

Pour qui se prend « Joseph Kabila »?  Quelle est sa motivation? Tente-t-il de restaurer l’influence rwandaise dans notre pays après le travail d’éradication que mène le président « Fatshi »? Le Grand Congo serait-il devenu un butin de guerre pour la fratrie « Kabila » et les anciens combattants de l’AFDL?

« Kabila » yo nani? Uku nani ? Nge nani? Wewa ngani? Dix-huit ans de pouvoir d’Etat aux mains d’un étranger, ça suffit!

Baudouin Amba Wetshi


Article publié le mardi 10 juin 2025
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